Le Conseil constitutionnel a rendu une décision le 25 juillet 2025 validant les nouvelles conditions de détention du capital social des sociétés d'exercice libéral (SEL) de Conseils en Propriété Industrielle (CPI). Cette décision confirme la volonté du législateur de renforcer l'indépendance de la profession, un objectif jugé d'intérêt général par les Sages.
Le litige
L'ordonnance du 8 février 2023 avait pour objectif de modifier le cadre juridique des CPI, en abrogeant notamment une dérogation qui permettait à certaines sociétés de ne pas être majoritairement détenues par des professionnels de la propriété industrielle. Avant cette ordonnance, l'article L. 422-3 du code de la propriété intellectuelle offrait une exception aux sociétés déjà constituées avant la loi du 26 novembre 1990, les exemptant de l'obligation que plus de la moitié de leur capital social et des droits de vote soient détenus par des CPI.
Mais depuis cette ordonnance en revanche, cette dérogation étant supprimée, les sociétés concernées disposent d'un délai d'un an (jusqu'au 1er septembre 2025) pour se conformer aux nouvelles exigences, sous peine de radiation de la liste des CPI tenue par l'Institut National de la Protection Industrielle (INPI).
La position du Conseil
Devant le Conseil, la Compagnie nationale des conseils en propriété intellectuelle soutenait que cette abrogation et l'imposition de nouvelles règles de conformité constituaient une cession forcée des parts sociales pour les actionnaires non-professionnels, portant ainsi une atteinte disproportionnée au droit de propriété garanti par l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Elle arguait également d'une violation de la liberté d'entreprendre et de la garantie des droits, ainsi que d'une incompétence négative du législateur.
Mais après avoir examiné attentivement ces arguments, le Conseil a rappelé que le droit de propriété, bien que fondamental, peut faire l'objet d'atteintes justifiées par un motif d'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi.
Or pour les Sages, l'objectif du législateur, en imposant une détention majoritaire du capital par les CPI, est bien d'assurer l'indépendance de la profession et cette indépendance est jugée essentielle pour garantir la qualité, l'impartialité et la sécurité juridique des conseils fournis aux entreprises et aux inventeurs en matière de protection de leurs droits. Le Conseil a donc estimé que la fin de la dérogation contribue à la réalisation de cet objectif d'intérêt général.
Pas de "cession forcée" et un délai suffisant
Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a réfuté l'argument de la cession forcée des parts. Il a souligné que les dispositions contestées se contentent de rendre applicable une règle de répartition du capital social et n'instaurent pas de mécanisme de cession forcée. Les modalités de mise en conformité, qu'il s'agisse d'une cession de parts sociales ou d'une augmentation de capital, relèvent du libre choix des actionnaires.
De plus, le Conseil a jugé que le délai accordé aux sociétés (jusqu'au 1er septembre 2025) pour se mettre en conformité était suffisant.
En conséquence, le Conseil constitutionnel a conclu que les dispositions contestées ne portaient pas une atteinte disproportionnée au droit de propriété, à la liberté d'entreprendre ou à la garantie des droits. Il a également écarté le grief d'incompétence négative.
Texte officiel : Décision n° 2025-1150 QPC du Conseil constitutionnel ; J.O. du 26 juillet 2025.