La directive européenne relative à l'efficacité énergétique oblige les entreprises à réaliser, tous les quatre ans, un audit énergétique de leurs activités. Ce nouvel arrêté, entré en vigueur le 14 juillet 2025, précise les modalités de réalisation de cet audit et de reconnaissance de la compétence des auditeurs énergétiques.
L'objectif principal de ce texte, qui contient 32 articles répartis en 4 chapitres augmentés de 3 annexes, est de définir un cadre clair et rigoureux pour la réalisation de l'audit énergétique en entreprise. Il annule et remplace le précédent arrêté du 24 novembre 2014 qui prévalait jusqu'ici. Il détaille notamment les processus de certification des prestataires d'audit et d'accréditation des organismes certificateurs.
Un cadre méthodologique renforcé pour des audits plus efficaces
Le Chapitre 1er de l'arrêté se concentre sur les modalités de réalisation de l'audit énergétique en entreprise, apportant des précisions importantes sur le périmètre et la méthodologie à suivre.
Définitions Claires : L'article 1er établit des définitions précises pour des termes clés comme « Activité d'audit » (couvrant les bâtiments, procédés industriels et transports), « Prestataire d'audit énergétique », « Référent technique » et « Auditeur énergétique », clarifiant ainsi les rôles et responsabilités de chacun.
Conformité aux Normes : L'article 2 stipule que l'audit énergétique doit impérativement respecter les exigences générales de la norme NF EN 16247-1 : 2022 pour sa préparation, sa réalisation et sa restitution. Ces exigences sont complétées par les normes spécifiques NF EN 16247-2 : 2022 (Bâtiments), NF EN 16247-3 : 2022 (Procédés) et NF EN 16247-4 : 2022 (Transport), en fonction des usages énergétiques audités. Un point crucial est l'évaluation obligatoire des opportunités de recours aux énergies renouvelables et de récupération, en considérant leur rentabilité coût-efficacité.
Audit des Procédés Industriels Approfondi : Pour les activités industrielles, l'article 3 exige un niveau d'audit a minima équivalent au niveau 2 de l'annexe B de la norme NF EN 16247-1 : 2022. Il impose de prendre en compte les usages énergétiques représentant plus de 10 % des consommations du site, avec un minimum de trois usages retenus. L'audit doit également caractériser les consommations et les niveaux de température des procédés industriels, évaluer les opportunités d'amélioration de l'efficacité énergétique et de recours aux énergies renouvelables, y compris les températures des rejets de chaleur fatale.
Classification des Actions : L'article 4 introduit une classification des actions d'économies d'énergie et de recours aux énergies renouvelables et de récupération préconisées. Ces actions doivent être catégorisées selon leur temps de retour sur investissement estimé : inférieur ou égal à un an, entre un et trois ans, entre trois et cinq ans, ou supérieur à cinq ans. Cette classification permettra aux entreprises de prioriser leurs investissements.
Échantillonnage pour les Bâtiments : L'article 5 offre la possibilité aux entreprises ayant des activités similaires dans différents bâtiments de réaliser un audit énergétique sur un échantillon représentatif, sous réserve de justifier la pertinence de cette approche selon la procédure définie en annexe 1.
Reconnaissance des Compétences : L'article 6 détaille les conditions de reconnaissance de la compétence des auditeurs. Un prestataire externe doit être titulaire d'une certification conforme à l'arrêté, tandis qu'un personnel interne à l'entreprise devra respecter des critères spécifiques définis en annexe 3. Une nouveauté importante est l'obligation pour les prestataires externes d'indiquer leur numéro de certificat et de joindre une copie de celui-ci au rapport d'audit. Pour les audits internes, le rapport devra justifier les moyens techniques mis en œuvre et la conformité du personnel, en annexant un organigramme et les CV des référents techniques.
Processus de certification : garantir la qualité et l'impartialité
Le Chapitre 2 de l'arrêté établit le processus de certification de la prestation d'audit énergétique, un élément central pour assurer la fiabilité des audits réalisés.
Objectif de la Certification (Article 7) : L'objectif principal de la certification est de garantir aux entreprises que les audits énergétiques sont réalisés de manière transparente, sans conflit d'intérêts, et qu'ils respectent des exigences de qualité. Cela permet aux entreprises d'utiliser les résultats pour améliorer leur performance énergétique. Les prérequis pour les prestataires d'audit sont définis en annexe 2.
Demande de Certification (Article 8) : Tout prestataire candidat à la certification doit déposer une demande auprès d'un organisme certificateur accrédité. La certification initiale est valable pour une durée maximale de quatre ans, avec des renouvellements et des surveillances périodiques. L'article détaille les modalités d'évaluation selon que le prestataire ait déjà réalisé ou non des audits réglementaires. Une attention particulière est portée aux prestataires multi-sites, qui doivent démontrer l'uniformité de leur méthodologie.
Revue de la Demande (Article 9) : L'organisme certificateur examine la demande pour s'assurer qu'elle entre dans le champ d'application de l'arrêté et que toutes les informations requises (annexe 2) ont été transmises. Un contrat est signé entre le candidat et l'organisme certificateur pour initier le processus.
Certification Préparatoire (Article 10) : Pour les prestataires n'ayant pas encore réalisé d'audit réglementaire, une "certification préparatoire" est mise en place. Valable douze mois, elle permet au prestataire de réaliser jusqu'à trois audits avant d'entamer le processus de certification initiale, qui inclura l'évaluation de leur première prestation.
Évaluation de la Demande (Article 11) : Les modalités d'évaluation varient en fonction du nombre d'audits déjà réalisés par le prestataire. Une évaluation à distance est possible pour un faible nombre d'audits, tandis qu'une évaluation sur site est requise si le prestataire a réalisé plus de trente audits au cours des vingt-quatre mois précédents, ou pour les prestataires sous certification préparatoire. L'évaluation sur site vise à contrôler la cohérence des preuves, récupérer les informations manquantes et interviewer les équipes d'audit. Des contrôles par sondage sont également effectués pour vérifier la validité des preuves. L'article précise les délais pour la levée des non-conformités, avec des évaluations supplémentaires à la charge du prestataire si les actions correctives sont jugées insuffisantes.
Décision et Délivrance (Articles 12, 13, 14) : Après une revue indépendante des résultats d'évaluation, la décision de certification est prise de manière impartiale. En cas de décision favorable, un certificat unique est délivré, rendu public, et inclut des informations essentielles telles que la dénomination sociale, la portée de la certification (bâtiments, procédés, transport), la référence à l'accréditation, les dates de validité et le type de certification (initiale, préparatoire, renouvelée).
Liste des Prestataires Certifiés (Article 15) : Chaque organisme certificateur doit maintenir et rendre publique, via un moyen numérique gratuit, la liste des prestataires d'audit énergétique certifiés et les activités couvertes.
Surveillance et Évaluations Supplémentaires (Articles 16 et 17) : L'organisme certificateur assure une surveillance périodique du respect des exigences de certification. Des évaluations supplémentaires, inopinées ou non, peuvent être déclenchées en cas d'informations pertinentes (plaintes, modifications organisationnelles) susceptibles de remettre en cause la certification.
Suspension ou Retrait de Certification (Article 18) : L'absence de preuves de levée de non-conformités dans les délais impartis peut entraîner la suspension ou le retrait de la certification, ou le rejet de la certification préparatoire. Pendant une suspension, le prestataire ne peut plus réaliser de nouveaux audits. En cas de retrait pour non-conformités répétées, une nouvelle demande ne pourra être déposée qu'après six mois. Si un prestataire n'a pas achevé d'audit réglementaire au cours des vingt-quatre mois précédant l'évaluation, sa certification est retirée, et il doit repasser par le processus de certification préparatoire.
Transfert et Extension de Certification (Articles 19 et 20) : L'arrêté prévoit les modalités de transfert d'une certification d'un organisme certificateur à un autre, sous certaines conditions strictes, notamment la validité de la certification existante. L'extension du champ de la certification à de nouvelles activités ou de nouveaux sites est également encadrée.
Indépendance et Compétence des Organismes Certificateurs (Articles 21 et 22) : L'arrêté insiste sur l'indépendance de jugement des organismes certificateurs, tant sur le plan commercial que financier. Ils doivent également disposer d'un processus rigoureux de sélection et de désignation des évaluateurs, garantissant leur impartialité et leurs compétences.
Rapports Annuels à la DGEC (Article 23) : Chaque organisme certificateur est tenu d'adresser un rapport annuel à la Direction Générale de l'Énergie et du Climat (DGEC) avant fin mars, détaillant la liste des certifiés (y compris les suspensions et retraits), le nombre de plaintes, un bilan des non-conformités et la liste des personnes réalisant les évaluations.
Accréditation des organismes certificateurs : une garantie de confiance
Le Chapitre 3 de l'arrêté détaille le processus d'accréditation des organismes certificateurs, un maillon essentiel pour assurer la crédibilité de l'ensemble du dispositif.
Accréditation Obligatoire (Article 24) : Les organismes certificateurs doivent être accrédités par le Comité français d'accréditation (COFRAC) ou par un autre organisme national d'accréditation européen signataire de l'accord de reconnaissance multilatéral. Cette accréditation doit couvrir l'ensemble des exigences de l'arrêté et de ses annexes, ainsi que la norme internationale relative aux exigences pour les organismes certifiant les procédés et les services.
Procédure de Demande (Article 25) : L'organisme certificateur candidat à l'accréditation dépose un dossier auprès de l'organisme d'accréditation compétent. Seuls ceux ayant reçu une décision favorable de "recevabilité opérationnelle" sont autorisés à débuter leurs activités de certification. Une fois cette décision notifiée, l'organisme peut délivrer des certificats "hors accréditation", avec un plafond de 10 certificats pour ceux qui détiennent déjà une accréditation en produits et services, et de 5 pour les autres. L'accréditation doit impérativement être obtenue dans un délai maximal de dix-huit mois à compter de la décision de recevabilité favorable, une copie de cette décision étant transmise à la DGEC.
Suspension et Retrait d'Accréditation (Article 26) : L'organisme d'accréditation et l'organisme certificateur doivent informer la DGEC de toute suspension, retrait ou résiliation de l'accréditation. En cas de suspension, l'organisme certificateur ne peut plus délivrer de nouveaux certificats. En cas de retrait d'accréditation ou de cessation d'activité, il ne peut plus délivrer de certificats et les certificats déjà émis restent valides pendant six mois. L'organisme certificateur doit alors informer ses clients des modalités de transfert de certification.
Nouvelle Demande d'Accréditation (Article 27) : Un organisme certificateur ayant fait l'objet d'un refus ou d'un retrait d'accréditation ne peut déposer une nouvelle demande qu'après un délai de six mois. Il devra alors prouver qu'il a remédié aux motifs de refus ou de retrait et pourra délivrer un maximum de trois certificats avant l'obtention de la nouvelle accréditation.
Régime transitoire et dispositions finales : une transition en douceur
Le Chapitre 4 de l'arrêté aborde le régime transitoire et les dispositions finales, assurant une mise en œuvre progressive et claire des nouvelles règles.
Période Transitoire pour les Prestataires Existants (Article 28) : Par dérogation à l'article 6, les prestataires externes reconnus compétents selon les critères de l'ancien arrêté du 24 novembre 2014 peuvent continuer à réaliser des audits énergétiques réglementaires jusqu'au 30 juin 2026. Cela offre une période d'adaptation aux professionnels déjà en activité.
Valorisation des Audits Antérieurs (Article 29) : Pour les demandes de certification initiale, les audits énergétiques déjà transmis à l'administration et réalisés conformément à la réglementation antérieure pourront être utilisés et évalués selon les critères applicables au moment de leur réalisation. L'organisme certificateur devra informer trimestriellement la DGEC de l'état d'avancement du nombre de prestataires qualifiés ayant obtenu une certification jusqu'au 30 juin 2026.
Publication d'un Guide (Article 30) : L'arrêté prévoit la possibilité de préciser les modalités de certification ou d'accréditation dans un guide qui sera disponible sur le site internet du ministre chargé de l'énergie, afin de faciliter la compréhension et l'application des nouvelles règles.
Abrogation de l'Ancien Arrêté (Article 31) : L'arrêté du 24 novembre 2014 est abrogé à compter de l'entrée en vigueur du présent arrêté. Toutefois, il demeure applicable aux audits énergétiques réalisés avant cette date, garantissant ainsi la validité des travaux déjà effectués.
Application (Article 32) : La directrice du climat, de l'efficacité énergétique et de l'air et le directeur général des entreprises sont chargés de l'exécution de cet arrêté, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Annexes
Cet arrêté comprend également les 3 annexes suivantes :